"Develop an interest in life as you see it: the people, things, literature, music. The world is so rich, simply throbbing with rich treasures, beautiful souls and interesting people. Forget yourself." Henry Miller
L'autre jour je suis au goûter - la fête annuelle de mon asso - et l'ambiance est super sympa. Je me suis assise entre deux mamans - une maman d'ado et la maman d'un bébé adorable de 10 mois. L'ado n'est pas avec nous, elle ne veut plus venir à l'Oasis et puis y'a la fête de Malakoff. Bref, la maman d'ado que je connais depuis plusieurs années, commence à me raconter ses problèmes de santé. Ses douleurs de l'abdomen. Au bout de 15 secondes, mon attention divague et je m'intéresse au bébé en train de renverser sa compote sur les sandales de sa maman....
Je me souviens quand j'ai eu mon bras / épaule cassée, les tours et détours, douleurs et progrès de ma santé, qui me passionnaient car ils conditionnaient une grande partie de ma vie - je racontais ça à qui que ce soit et au bout de quelques instants ses yeux allaient à droite, à gauche... PERSONNE N'EN AVAIT RIEN À FOUTRE !! Et moi j'avais besoin de raconter quand même... Ma blessure, c'était important pour moi !
On a parfois besoin d'être écoutés plus longuement - les très bons amis et les psys sont là pour ça !!! et dans ma vie de tous les jours, pas dans 100 % des cas mais pour "le mal être et l'envie de se plaindre ordinaires", j'ai opté pour le rationnement. C'est-à-dire que le mal être ou la plainte a un espace pour se dire ! et il ne prend pas TOUTE la place ni même BEAUCOUP de la place dans la discussion ou la conversation.
Quand nos filles étaient petites et que l'une était d'humeur chougneuse ou revendicatrice, son père ou moi (ou les deux en alliance) leur disions, - Allé, Chougnon a 5 minutes pour s'exprimer ! (Chougnon ou Raloton) et ça y allait, ça y allait... Au bout de 2 minutes en général tout était dit. - C'est tout ? - Oui. -Chougnon est satisfait ? - Moui. - On peut ouvrir la fenêtre et lui permettre de s'en aller ? - Bon, d'accord.
Et la journée reprenait son cours, plus joyeux.
Dimanche matin j'étais d'une humeur de crotte. Y'avait la fête à Malakoff et la fête à Malakoff ça fait du bruit, ça privatise le parc, notre voiture est partie à la fourrière, j'étais grognon. Nicolas voulait qu'on planifie notre journée, on allait voir une expo qui lui faisait plaisir. Et je n'avais pas envie de gâcher le plaisir et même j'avais envie de me joindre à son enthousiasme - mais j'avais d'abord un gros Chougnon à évacuer. - Tu me laisses râler 5 minutes et après on parle d'Ellsworth Kelly ? Et il m'a écoutée déblatérer sur la fête (il a peut-être même compati, bon, faut pas trop en demander, à la fois c'est lui qui est allé chercher la voiture à la fourrière pendant que je vivais et animais la fête de mon asso) mais l'important c'est qu'ensuite j'ai été libérée et contente de l'écouter et de poser des questions et j'ai pu me projeter dans notre expo.
L'ennemi, c'est le ressassement - dit Charles Pépin. Oh combien vraie cette phrase.
On a besoin d'évacuer sa blessure, peut-être pour le plaisir de se plaindre mais que ce plaisir soit bref ! qu'il soit le moyen de passer à autre chose, et pas une fin ou une boucle... parce que qu'est-ce que c'est nécessaire de se plaindre, mais qu'est-ce que c'et chiant !! et self absorbed !
Et toi ma chérie-chéri - comment tu donnes une place, une juste place, à la plainte dans ta vie ?
Bonjour Christie, ouh la, ton billet me remue! J'avais rencontré un monsieur cet hiver, et la rencontre était merveilleuse et prometteuse, et puis ça s'est transformé en truc très très cafouilleux, fait de hauts et de bas, pas du tout satisfaisant, ces derniers mois. Et comme j'étais loin à l'étranger pour mon travail, j'ai dû faire face à ça pas mal toute seule, c'était vraiment dur et j'ai énormément ruminé, ça m'a pris l'essentiel de mon temps de cerveau disponible en dehors du boulot... Ca m'énervait beaucoup mais je n'ai pas réussi à faire autrement. Là je suis revenue dans ma vie normale, et je viens de mettre un terme au cafouilleux. Et j'en ai pas mal parlé à quelques bonnes amies ces derniers jours, en ayant toujours peur d'être pénible et trop self-absorbed. En même temps je ne crois pas que c'était le cas, à chaque fois elles ont aussi partagé leurs expériences de moments difficiles du même genre, et c'était vraiment chouette. J'ai l'impression d'avoir besoin de l'extérioriser un peu quand même (en dehors de la psy, les pages dans un carnet, etc.) pour y penser moins moi-même, mais ce n'est pas toujours simple de ne pas ruminer...
Rédigé par : Camille | mardi 25 juin 2024 à 15:37
hmmm, c’est une perspective super intéressante sur la "bonne ration" de chougnon, quelle est cette mesure... Et, en même temps, moi qui l'ai longtemps juste intériorisé, j'apprends petit à petit, surement de façon brouillonne et parfois mal dosée à exprimer douleur physique et à mon petit coeur. Et je comprends mieux pourquoi y'a des amis que j'ai moins le gout de voir tellement ils ne font QUE chougner. J'aime bien l’idée de poser un cadre au chougnon...
Et BRAVO Camille d'avoir su mettre un terme à l'histoire cafouilleuse.
Rédigé par : Lou | mardi 25 juin 2024 à 16:06
Comme c'est bien vu de cadrer le Chougnon/Raloton en lui accordant une vraie place à un temps donné (et limité) ! J'aurais dû y penser quand mon enfant avait des moments de râlerie intensive. Tu t'inscris à fond dans les approches systémiques (école de Palo Alto & Cie) avec cette façon de faire (la prescription paradoxale). Longtemps j'ai ravalé mes plaintes (je savais qu'on ne les écouterait pas/ne les entendrait pas), à présent quand je traverse un moment un peu difficile j'ose m'en ouvrir à certaines personnes. J'essaye toujours de ne pas faire trop long, je vois assez vite quand les gens décrochent, mais il est vrai que parfois on a besoin de déballer un peu plus longtemps que ce que l'autre est prêt à recevoir. Tant pis, si ce n'est pas le mode habituel de relation qu'on a avec autrui, il me semble que ça n'est pas bien grave.
Rédigé par : Emilie | mardi 25 juin 2024 à 19:23
Coucou mes copines ! bien sûr ce traitement de la plainte est "dans la vie quotidienne, pour les petits bobos". Pour les grands traumatismes un deuil une perte de job une séparation you name it, ça ne vaut plus. La douleur prend le temps qu'elle prend !! Et là l'écoute se tend, la disponibilité à la plainte s'accroit. Idem pour les relations toxiques, ce qu'elles peuvent bouffer d'espace de conversation et d'espace mental.... Mais je refuse d'avoir autour de moi - quand les personnes vont suffisamment bien - des gens qui se plaignent plus que le temps reglementaire et sont self absorbed non stop et dans toutes les circonstances de la vie. D'ailleurs je n'en ai pas.. Ce qui accroit (j'espère) ma disponibilité pour écouter et être là en cas de coup vraiment dur.
Une autre norme qui m'a beaucoup aidée c'est celle de Jay Shetty : quand tu as un coup dur, pleure un jour PUIS remets toi au travail. Quand tu as une victoire célèbre un jour Puis remets toi au travail. Je trouve ça aidant "pour les coups durs pas trop durs mais quand même, une déception".
Camille... les histoires cafouilleuses... Mamma Mia... que c'est dur de s'en dépêtrer... Faut avoir autour de soi des personnes vraiment saines, qui ont une solide colonne vertébrale et qu'on écoute et qui nous disent les choses. J'espère que tu as ça près de toi.
Lou, le cadre au chougnon il est pas si facile de le poser avec ses potes.. mais avec certains qui le font beaucoup, et avec humour, "allé, t'as 5 minutes !!" ça passe ?
Emilie, c'est vrai ce que tu écris, je trouve qu'on n'est pas cablés pour écouter longtemps.... c'est dommage car ça nous rapproche..... Je vous embrasse mes copinettes !
Rédigé par : Christie | mardi 25 juin 2024 à 19:40
J'ai bien envie d'essayer la méthode Chougnon avec mes enfants !
Je me sens bizarrement fière de moi quand je réussis à accueillir une plainte simplement, sans chercher à donner de conseils ou de solutions, mais sans non plus en remettre une couche dans la complaisance. Quand je sens que la personne en face se sent écoutée. C'est comme si le plus simple était aussi le plus dur.
Rédigé par : Milky/Bree | mercredi 26 juin 2024 à 09:24
y'a de quoi être fière. le plus simple est en effet le plus dur.
Les enfants - et les personnes adultes - la plupart du temps, ça fait tellement du bien d'être face à quelqu'un qui ne nous laisse pas nous répandre. Qui nous contient ou nous aide à nous contenir !!!
Rédigé par : Christie | mercredi 26 juin 2024 à 17:22