Nous décrochons - c'est-à-dire nous frôlons la folie - tous les jours, plusieurs fois par jour.
Cette phrase, ce n'est pas moi qui en suis l'auteure, lorsqu'on est thérapeute, coach, formateur, il est recommandé de se faire superviser par un professionnel plus expérimenté - c'est ce que je fais, et cette phrase a été prononcée par mon superviseur, lors de l'une de nos sessions de groupe. Elle creuse depuis son chemin à l'intérieur de mes synapses ; car très souvent, enfin, il lui arrive de lancer de ces phrases qui m'accrochent, dont je ne sais pas quoi faire ni que penser sur le moment et puis je m'en souviens et je me dis Ah oui, c'était ça peut-être qu'il voulait dire, mon expérience rejoint sa phrase.
Et donc au sujet de la santé mentale, je trouvais ça un peu fort cette phrase, plusieurs fois par jour, frôler la folie. Et pourtant malgré moi, enfin, sans le chercher, j'ai observé plus finement les mouvements de mes décrochages, et j'avoue que ces derniers jours je n'étais plus très sûre d'être saine. Une envie de rester couchée, un aquoibonaprèstout, faisant suite à des petits travers physiques, à une réflexion sur le suicide qui s'amplifie (pas que je songe spécialement au suicide me concernant, mais bon, je suis cernée dans mon passé et dans mon présent par des personnes proches et loin de moi qui ont fait ce choix, et ma pensée que je croyais fixée, évolue avec le temps, en gros avant je pensais Le jour où je serai mère je n'aurai plus le droit de me suicider et aujourd'hui je pense Bon, après tout on a le droit de vouloir choisir quand et comment on meurt.
J'aime bien ne pas être fixée sur un sujet.
Ensuite je me questionne sur Comment faire pour que (chez moi et peut-être chez d'autres) les raisons de vivre soient les plus nombreuses ?
Une des réponses passe par la corps - avoir un corps tonique et en bonne santé.
Une autre réponse passe par les êtres aimés - être entourée de personnes avec qui j'ai de bonnes relations.
Une troisième réponse passe par mes projets - comment je peux me projeter dans un futur proche, moyen proche et lointain, avec bonheur et envie d'y être ?
... Bon ben ces jours-ci, ma cheville était foulée; mes copains sont partis se confiner ailleurs ; et l'un de nos projets qui nous tenait à coeur avec Nico, est tombé à l'eau (une maison que nous désirions visiter a été vendue avant même que l'on puisse la voir). Petits, petits bobos de l'âme, tellement minus, tellement pas graves, alors pourquoi je me suis sentie ainsi ébranlée ?
Plus envie de me lever, plus envie de manger, plus envie de rien.
Bon, ça a duré 8 heures ma dépression.
Nico a proposé une virée au marché des livres (celui dans Paris, sous une halle style Eiffel longeant le parc Georges Brassens, à 12 minutes de la maison à vélo), et j'étais repartie sur ma bête, et on a trouvé plein de livres of course. Ensuite je suis retournée voir ma maison d'enfance, dans les Yvelines, enfin, voir ma maman dans ma maison d'enfance, au moins 18 mois que je n'y étais pas retournée et Dieu que ça m'a fait plaisir. Y'a même des tas de trucs qui ont changé ! dans la maison et autour.
Et tout ça, ces micro-projets, qui agissent sur le corps, et sur les relations, et sur l'âme, et bien ça m'a redonné confiance dans la vie, et dans moi, ma capacité à reconstruire une vie à partir de petits bouts de trucs.
Tout va mieux.
Décrochage, raccrochage, capacité à les penser, capacité à m'auto-panser, et à saisir les mains qui me sont tendues.
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