"PARIS (Reuters) - La cour d'appel de Paris a donné mercredi son feu vert à l'extradition vers l'Italie de l'ancien activiste d'extrême gauche Cesare Battisti, suscitant de vives protestations au sein de la gauche française."
La justice a donc tranché en appel. Il reste à Battisti un pourvoi en cassation.
Je ne comprends pas les partisans, qui s'aloignent purement et simplement du terrain du droit, pour entrer dans des initiatives contradictoires pour faire valoir leurs arguments.
Ainsi, "Me Irène Terrel, avocate de Cesare Battisti, a dénoncé "une décision politique prise sur ordre qui déshonore nos institutions et les principes d'un Etat de droit"." et "Le député Vert de Paris Yves Cochet a annoncé que son parti, le PS et le PC allaient demander au président Chirac de ne pas faire exécuter la décision." (source reuters)
Il faudrait savoir ce qu'ils veulent : l'indépendance de la justice, ou que celle-ci ne le soit pas uniquement dans des décisions favorables à leurs causes ?
On a dans la balance une « parole donnée » et une un respect de l'indépendance de la justice — qui plus est, à l'heure d'une constitution européenne… Battisiti, c'est quand même pas Omar Radad.
Rédigé par : skoteinos | 01 juillet 2004 à 09:06
La contradiction n'a jamais effrayé les apologistes de l'idéologie communiste, qui pardonnent même l'assassinat commis pour la bonne cause et rangent une délocalisation d'usine au rang des crimes contre l'humanité.
La parole donnée de Mitterrand, outre qu'elle viole allègrement l'indépendance de l'autorité judiciaire, mais pour ce que le président Mitterrand s'en souciait, cela se fond dans le décor, cette parole déshonorait la France en insultant les familles des victimes.
Le principal débat juridique, car il y en avait un, n'a pas été relevé ni par la presse ni par les intellectuels en mal de cause qui ont du coup choisi la cause du mal.
En France, un condamné par contumace (c'est à dire jugé par défaut pour un crime), quand il est arrêté, voit la contumace purgée, c'est à dire que le précédent jugement est annulé et un nouveau procès se tient en sa présence.
La même garantie existe devant les autres juridictions pénales.
Or ce n'est pas le cas en droit italien.
La condamnation de Battisti est définitive car il n'a pas comparu à son procès.
Le débat juridique est le suivant : en droit international, l'extradition doit être refusée si le crime pour lequel l'extradable a commis n'est pas puni par la loi du pays requis, ou si la peine n'est pas prévue par son ordre interne.
Ainsi la France refuse l'extradition vers les pays où la peine de mort est pratiquée sauf si des garanties suffisantes sont données que cette peine ne sera pas prononcée. C'est le cas avec les Etats Unis, par exemple.
Ici, une garantie fondamentale offerte par le droit français est absente : le droit à un nouveau procès. Cette absence constitue-t-elle un obstacle à l'extradition ?
Voilà un des points qui étaient en débat.
Et qui est plus intéressant que le poids de la parole d'un président mort, la parole d'un chef d'Etat n'ayant jamais, en démocratie, été une source de droit.
Rédigé par : Eolas | 01 juillet 2004 à 11:24
Eolas, j'aime quand tu viens avec brillant éclairer ces débats. Je note néanmoins que Battisti, s'il n'était pas présent à son procès, était néanmoins représenté par ses avocats, qui ont fait appel, et perdu ce recours en appel en 1990.
Quel est le sens de la contumace quand le prévenu est identifié, libre de se présenter, n'y consent mais se fait représenter quand même ? Quel en serait l'équivalent en droit français ?
Rédigé par : versac | 01 juillet 2004 à 11:42
Précisément, jusqu'à une date récente (qui ne me revient pas mais je crois que c'est mars 2002), un prévenu qui ne comparaissait pas n'avait pas le droit d'être défendu. Oui, je parle bien de la France, pays des droits de l'homme.
Il a fallu que la Cour européenne des droits de l'homme condamne la France pour que la Cour de cassation impose aux juridictions pénales d'entendre un avocat qui se présente au nom d'un prévenu ou accusé absent, voire en fuite.
Et les premiers mois qui ont suivi, j'allais aux audiences où je savais que mon client serait absent avec une copie de cet arrêt au dossier pour le mettre sous le nez des présidents récalcitrants.
Aujourd'hui, si un avocat se présente au nom du contumax, il doit être entendu (note bien : entendu, pas écouté...).
Rédigé par : Eolas | 01 juillet 2004 à 19:17