Telos-eu a publié récemment une étude sur l'attitude face àla mondialisation des députés français, qui fait clairement apparaitre un clivage gauche-droite sur ce thème. Les auteurs de Telos s'expriment sur le sujet : Fontagné, Grunberg, Laïdi.
François en traite de manière synthétique. Damien aussi. Alexandre, sur econoclaste, émet de très justes remarques. Je ne vais pas revenir dessus dans le détail, les commentaires ont été abondants, mais j'ai quand même quelques remarques :
L'échantillon utilisé correspond manifestement à tous les députés qui ont répondu. Cela m'apparait comme un biais, les députés n'étant pas forcément représentatifs de la diversité de leur groupe, principalement au PS.
Je me pose des questions sur la culture économique (voire parfois la santé mentale) de nos députés, quand je lis ces réponses :
"A ceux qui disent que face à la mondialisation il faut protéger les gens et non les emplois"
> "vous pensez que c’est un faux débat car les deux sont liés". PS: 75%, UMP : 73,4%
Pourtant, ne sont-ils tous pas les chantres de la flex-sécurité machin-chouette ? Ont-ils seulement compris le sens des modèles nordiques ?
Le « patriotisme économique », cette idée vous semble être :
> "Une idée intéressante mais sans contenu concret : PS : 57,45%, UMP : 40,43%
J'adore le principe qui est de trouver séduisant un concept mou derrière lequel on n'arrive pas à mettre de réalité.En enfin, la meilleure :
Si la mondialisation est responsable de la crise de l’emploi, comment expliquez vous que d’autres pays aient un taux de chômage plus faible
> "parce que les comparaisons statistiques ne sont pas pertinentes", 51% des députés PS !!!
On se croirait en plein mauvais trip soviétique. Si les autres réussissent, c'est qu'ils calculent mal. On ne peut pas réussir face à la mondialisation. Un vrai choc de culture, pour le coup.
Cette étude, donc, je l'analyse moins comme une révélation du clivage gauche-droite que comme une confirmation du fait que, oui, nos députés sont parfois bien à l'ouest, que ce soit dans le délire compétitiviste à droite, ou dans les logiciels du refus, à gauche.
Si clivage il y a, comme le note fort justement Alexandre Delaigue, il porte plus sur les politiques à mener que sur le diagnostic général de la mondialisation en tant que processus, où un gros ventre mou des deux camps se rejoint, et ce principalement sur l'emploi. Ainsi, on note une attitude complètement opposée des députés PS et UMP concernant la flexibilité du marché du travail, ou, pour le coup, dans les raisons du chômage : trop de libéralisme pour les socialistes, trop de rigidités pour les députés de droite.
Bref, des attitudes opposées (avec une UDF proche de l'UMP, en version plus modérée).
Je finis, en vous invitant à parcourir les billets cités plus haut, avec Grunberg:
Ces observations conduisent à penser que l'articulation de la question de l'emploi et de celle de la mondialisation va devenir un enjeu majeur du clivage gauche/droite dans la période à venir. Face à une droite de gouvernement, plus libérale demain qu'hier sur le plan économique, qui défendra l'idée que nos difficultés à affronter la concurrence internationale ont des origines spécifiquement françaises qui nous obligent à modifier notre modèle social pour diminuer le chômage, la gauche, estimant que la France n'a pas de difficultés spécifiques d'adaptation, voudra au contraire protéger le pays des dangers de la mondialisation, en défendant les services publics, en s'opposant aux délocalisations, en taxant davantage le capital et revendiquant le " modèle social français ", quitte à réduire les échanges internationaux et à protéger nos frontières face aux économies émergentes.
J'aurais tendance à me navrer que l'affrontement gauche-droite se fasse sur ces termes (je me verrais aller à droite !). Il me semblait qu'on aurait pu souhaiter que le nouvel affrontement gauche-droite se fasse plutôt sur des termes de débat moins caricaturaux, entre un modèle scandinave, ouvert, et un modèle libéral. Si la droite semble, en grande partie, s'être convertie à un certain libéralisme, la gauche semble définitivement rester dans une logique de protection par le maintien et l'action publique centrale, recettes bien anciennes...
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