La parution de l'enquête (PDF) du Cevipof est une confirmation bien déprimante sur l'état psychologique du pays. D'autres en ont déjà parlé : les français sont très négatifs sur l'état de la france et pessimistes quant à ses perspectives. Surtout, ils n'ont plus foi dans l'offre politique actuelle pour répondre à cette angoisse (69% ne font confiance ni à la gauche ni à la droite, 37% se déclarent ni de gauche ni de droite...). Juste une situation d'angoisse abominable, qu'on peut expliquer longtemps dans tous les sens, et qui est sans doute justementliée à ce manque de confiance dans le politique et l'absence de son renouvellement (tant les hommes que les approches). Les Français ont envie que cette angoisse cesse : ils veulent que ça change.
C'est ce qui explique que ceux qui incarnent le plus le changement dans leurs camps respectifs aient un tel écho : Ségolène Royal, qui bénéficie d'une prime à la fraîcheur, et Nicolas Sarkozy, pour son thème de la rupture. Finalement, c'est le mouvement plus que le positionnement sur l'échiquier qui semble séduire les Français (ou au moins autant). Et il faut que cette envie de changement soit crédible : il ne suffit pas de dire "un autre monde est possible", mais bien "nous allons créer quelque chose de différent".
Si l'on place les candidats (pour lesquels la réponse est disponible, elle ne l'est pas pour un bon nombre d'entre eux, dont Bayrou, ce qui est dommage) selon leurs scores sur les attributs "il veut vraiment changer les choses" et "il tient ses engagements" (soit ceux apportant une réponse crédible à la volonté de changement), on obtient le classement suivant (cliquer pour agrandir) :
Soit, sans surprise, Sarkozy et Royal qui incarnent le mieux un changement crédible. Villepin, à la date du terrain, était encore bien crédité. Le CPE aura peut-être affaibli ces scores. Suivent les suivants, avec un léger avantage sur DSK sur ce thème. Au passage, notons le piètre score de Fabius, décidément crédité de peu de confiance (aparté : Laurent, t'es du passé, songes-y, au lieu de dépenser inutilement de l'argent en pub google sur ce blog) et le faible score de Hollande sur la crédibilité (alors qu'il n'a jamais exercé de fonctions ministérielles, contrairement à sa compagne).
Mais regardez bien au milieu : Jean-Marie Le Pen, qui incarne un changement (effectivement, mais pas plus que DSK). Changement rejeté car non crédible (et dans une voie que les français ne souhaitent pas), mais changement quand même. Il suffit d'une rupture dans la confiance en la capacité de faire bouger les choses des principaux candidats pour que Le Pen devienne un vote d'expression forte de ce qu'ils ont au fond de leurs tripes : envie que ça bouge vraiment.
On a ici un bon exemple de victoire de la communication. Sarkozy a décidé du thème de la rupture depuis très longtemps, et n'a cessé de le renforcer par tous les aspects, du spot télévisé à ses conventions et ses actes symboliques, quand la réalité de ses exercices ministériels ne montre pas de rupture profonde ou de renversement de situation. Royal, elle, mise sur la nouveauté, la fraîcheur, la participation.
De plus en plus, ça ressemble à un scenario Bush-Dean : un candidat qui n'a pas forcément de crédit véritable dans ses actes, mais un discours global qui fonctionne bien, une perspective claire et segmentante, et en face un autre qui incarne une nouveauté, une différence, que les français ont envie d'essayer.
Qui sera le Kerry français ?
(au passage, je me demande : qui a accès aux tris à plat de cette étude et à des éventuels tris croisés complémentaires ? Uniquement le CEVIPOF ? Le ministère de l'intérieur ? Sont-ils rendus accessibles aux partis ?)
Le pessimisme explique en partie le manque de dynamisme économique. Un ami me disait récemment que lorsqu'il fait passer des entretiens d'embauche en France, les questions posées tournent souvent autour d'avantages acquis, alors que quand il en fait passer en Chine, on ne lui pose que des questions sur la formation et les possibilités de promotion. Les acteurs économiques ne se comportent pas de la même façon lorsqu'ils sont persuadés que le futur est meilleur et cela s'en ressent inévitablement sur la croissance.
Le jeu politique n'est plus qu'un jeu de communication et le film à sortir de Karl Zéro "Dans la peau de Jacques Chirac" en est une illustration absolument flagrante (voir mon post à ce sujet). Plus c'est gros plus ça passe. Le pire c'est que Chirac en ressort plutot positivement.
La scene politique française ressemble de plus en plus à la scene italienne, où la gauche n'a trouvé pour battre un nazillon caricatural qu'un Prodi de 70 ans au discours de recteur, qui a gagné d'extreme justesse et peut-être pas pour longtemps. C'est extremement déprimant de penser que nous ne sommes peut-être pas encore au fond du trou...
La gauche voudrait croire - avec Ségolene - à un renouveau et à un peu de sincérité face à des éléphants qui se sont usés jusqu'à la corde dans les affaires, au pouvoir, et les uns face aux autres. Ceci dit elle manque cruellement de leadership pour l'instant, le discours n'est pas encore ni rodé ni vraiment convainquant, elle se ferait étriller dans un face à face télévisé. Elle est plutot jolie et maligne mais la différence de maturité "technique" face aux caméras est - à date - redhibitoire pour espérer aller jusqu'au bout du marathon présidentiel. Ségolène, va voir le film de Karl Zéro et tires-en les leçons !
Et puis il est évident que l'éventuel candidat de la gauche au deuxième tour devra inévitablement présenter la preuve qu'il a parfaitement assimilé les leçons du NON au référendum, et c'est justement le contraire qui me saute aux yeux sur son site web...
Rédigé par : ava | 18 mai 2006 à 01:02
Les tris à plat sont le PDF dont tu donnes le lien ; les croisements : bonne question.
Rédigé par : FrédéricLN | 18 mai 2006 à 07:10
Je n'aime pas Fabius, comme beaucoup de français, mais de là à dire qu'il est un homme du passé... je ne serais pas aussi affirmatif, notamment parce que je viens d'entendre parler d'une sorte d'union sacrée contre une certaine "oie blanche" : le come-back de Jospîn (auquel je ne croyais guère et qui me déçoit énormément) se fait contre la victoire probable de Royal.
Décidément, la politique est plus en crise que la société française elle-même...
Rédigé par : Praxis | 18 mai 2006 à 09:32
Qui sera le Kerry français ?
Je suppose que tu as une idée mais tu préfères qu'elle soit exprimée dans les commentaires. Kerry était un homme d'expérience, légitime au sein du parti d'une part mais pas vraiment charismatique, pas très bon en campagne, dont on avait du mal à discerner le message, trop intellectuel, essayant trop de trouver la synthèse au lieu de faire campagne sur des idées fortes, pas vraiment bon vivant sympathique avec qui on aimerait dîner...tiens, ca me rappelle quelqu'un (petit indice : il ne s'appelle pas Jack Lang)
Rédigé par : g | 18 mai 2006 à 10:53
Versac :
"On a ici un bon exemple de victoire de la communication. Sarkozy a décidé du thème de la rupture depuis très longtemps, et n'a cessé de le renforcer par tous les aspects, du spot télévisé à ses conventions et ses actes symboliques, quand la réalité de ses exercices ministériels ne montre pas de rupture profonde ou de renversement de situation."
A-t-on jamais vu un simple ministre engager une rupture de la politique globale d'un gouvernement ? Un ministre applique la politique du gouvernement - il n'est pas sensé mener la revolution/rupture dans son coin... ? C'est au premier ministre et donc au chef de l'Etat de mener la politique du pays - et donc d'entamer des "ruptures" si besoin est...
Rédigé par : Jules | 18 mai 2006 à 10:56
Si j'énonce la finale du syllogisme du Jules,cela donne:"Et donc,il sera loisible à Sarkozy en tant que président de mettre en oeuvre ses ruptures".
Vas au terme de ton raisonnement,Jules
Rédigé par : Gil Bernstein | 18 mai 2006 à 11:08
Si j'énonce la finale du syllogisme du Jules,cela donne:"Et donc,il sera loisible à Sarkozy en tant que président de mettre en oeuvre ses ruptures".
Vas au terme de ton raisonnement,Jules
Rédigé par : Gil Bernstein | 18 mai 2006 à 11:08
"Laurent, t'es du passé"
En 1980, tout le monde pariait sur Rocard, censé incarner le renouveau face à Mitterrand (déjà candidat 25 ans avant, lui)...
En 1980, Mitterrand était totalement à la ramasse niveau sondage face à Giscard. Et on connaît la suite....
Si le PS veut gagner, il faut, comme Mitterrand en 1981, faire l'union de la gauche. Et je crois vraiment que Royal puisse la faire.
Les Français ne votent pas pour un programme, ils votent surtout pour quelqu'un qui a une stature d'homme d'état, qui est prêt à tout pour gagner, c'est d'ailleurs pour ça que Jospin a perdu en 2007. Et franchement, je doute que Royal ait une telle stature
Rédigé par : VinZ | 18 mai 2006 à 11:16
Au-delà de la rupture, toute la sémantique autour du "mouvement" est assez intéressante à analyser. La droite utilise de plus en plus ce critère pour se distinguer de la gauche; cette dernière étant jugée "immobile".
Dominique de Villepin notamment, n'a plus que cet argument en bouche pour essayer de faire illusion...Selon lui, le gouverenement "travaille", "est en mouvement", contrairement à ceux qui s'opposent en voulant rester immobiles...
La gauche aurait tout intérêt à communiquer sur la notion de "mouvement dans le bon sens". L'acceptation du mouvement par les français dépend bien du sens dans lequel il va. A chacun de montrer la voie dans laquelle il veut aller, tout en expliquant que cette notion de mouvement est d'ores-et-déjà acquise.
Rédigé par : Nicolas | 18 mai 2006 à 11:24
Concernant M. Fabius, il est quand même sidérant de l'entendre donner des leçons au gouvernement actuel sur des questions de responsabilité quand on connait sa gestion calamiteuse passée (entre autres l'épisode du "sang contaminé". Il serait temps que les militants du parti socialiste lui indique la porte de la sortie, s'il n'est pas capable de la trouver seul.
Pour M. Jospin, l'homme aux multiples adieux, l'homme soit disant "clair", un juste rappel de ses propos devrainet s'il est si honnete suffire à ce qu'il retourne contempler les vagues sur l'ile de Ré...
M. Hollande oublie l'utilisation sans vergogne des services de l'état par M. MIterand et ses proches à des fins personnelles. Il était lui même d'ailleurs proche de se pouvoir à cette époque.
La réalité est qu'une fois de plus le parti socialiste n'a aucun projet réaliste à proposer. Ses responsables réclament la démission du gouvernement (voir du Président, des élections anticipées et dans le même temps certains "présidentiables" ou leurs proches se répendent sur les ondes pour expliquer qu'un an ne sera pas de trop pour arriver à mettre sur pied un programme...
Le jeu des "alliés" à droite n'est pas plus clair. Une fois de plus la droite française démontre son incapacité à travailler dans l'interet du pays en tombant dans ses vieux travers de luttes personnelles.
Si c'était l'occasion d'enfin abandonner ces clivages gauche/droite sépassés ?
L'occasion de l'émergence d'une vraie force "centriste" proposant un programme de réforme ambitieux et réaliste.
La réunion d'hommes et de femmes compétants désireux de vraiment servir leur pays avant leurs intérets personnels.
Peut on y rêver ?
Rédigé par : fontaine | 18 mai 2006 à 11:30
Le numéro 2 de l'IFOP (j'ai oublié son nom), organisme qui a réalisé l'enquête du CEVIPOF (le monde est petit) l'a très bien dit dans un entretien récent aux Echos: M. Sarkozy n'incarne pas la rupture. C'est le candidat de la droite conservatrice. A l'étranger ça ne fait aucun doute. En France, on donne des sens très spéciaux aux mots rupture, réforme, changement...
Rédigé par : Eric | 18 mai 2006 à 12:12
Si le Le numéro 2 de l'IFOP l'a dit.. alors, il faut se prosterner.
Rédigé par : Jules | 18 mai 2006 à 12:18
Jules : sur sarkozy et la capacité de mettre en oeuvre des projets de changement lourds, j'ai un avis partagé.
Oui, il est crédité d'une véritable volonté, d'une capacité à décider. Mais en même temps, je ne l'ai jamais vu effectuer une réforme en profondeur, qui touche aux structures, au fond. Et le fait d'appartenir au gouvernement n'est pas une excuse. Sur lein de sujets, il disposait et dispose toujours d'une réelle autonomie. J'aurais préféré pouvoir dire que je l'ai vu faire quelque chose de profond, quellques que soient les circonstances.
Rédigé par : versac | 18 mai 2006 à 12:44
N'ais pas d'avis partagé,versac.Sarkozy est le candidat de la droite conservatrice avec les habits du modernisateur (il se prend pour Ataturk,ai-je coutume de dire).Le problème,c'est que les Ataturk,cela marche dans des sociétés archaiques qui ont besoin de modernisation;pas dans des sociétés post-modernes qui ont besoin de plus de justice sociale (ce qu'est la société française depuis une vingtaine d'années).
Sarkozy(et j'invite tous les lecteurs de Versac à faire une recherche sur google),c'est comparable aux hommes d'Etat(ou simples politiciens)suivants:Carlos Menem,Fernando Collor de Mello,Paulo Salim Maluf,Carlos Salinas,Alberto Fujimori...Faites-vous une idée à partir des biographies wikipedia:bilan,stratégies marketing,positionnement social et politique,lien aux milieux d'affaires et financiers,aux affaires,...,et vous vous ferez une idée assez précises des contours de Sarkozy si Sarkozy PR en 2007.
Rédigé par : Gil Bernstein | 18 mai 2006 à 12:55
Sarkozy s'affiche comme libéral et atlantiste, c'est déjà une rupture par rapport au discours traditionnel de la droite de gouvernement en France. En outre il a supprimé la double peine et s'est prononcé en faveur du vote des immigrés aux élections locales. Je crois qu'il a une capacité d'entraînement, c'est à dire qu'il pourrait amener les français à accepter des changements auxquels ils ne sont pas prêts aujourd'hui. En fera-t-il usage et à bon escient ? Nul ne peut le prédire, mais je ne réduirais pas Sarkozy à ses provocations sur la sécurité ou l'immigration qui me paraissent procéder d'une stratégie de communication vers les électeurs tentés par le vote d'extrême droite. Rien ne dit qu'un Sarkozy président ne se révélerait pas un nouveau Chirac : volontaire dans le discours et pusillanime dans l'action.
Quant à Ségolène, elle se proclame écolo-familiale en faveur de l'ordre juste, je ne sais pas si cela en fait un équivalent de Howard Dean, mais j'ai effectivement du mal à croire qu'elle puisse tenir sur la durée.
Cela dit, la leçon du duel Bush-Kerry, c'est qu'il vaut mieux être le candidat des valeurs que celui des idées.
Rédigé par : Monsieur Prudhomme | 18 mai 2006 à 13:46
J'ajouterais que les hommes d'Etat que j'ai cité plus haut ont tous un style moderniste et sont profondément atlantiste.Sarkozy fascine et déroute car,contrairement à Chirac,il paraît "branché sur la mondialisation",atlantiste au sens blairiste du terme,néoconservateur en matière sociale,ce qui peut rassurer nombre de français pour qui les Etats-Unis demeurent ce vers quoi il faut tendre.Des Français de cetnre-gauche et l'essentiel de ceux qui votent à droite sont tourneboulés et séduits.
cela va-t'il suffire pour gagner?Je ne le crois pas car il y a une partie des français qui veulent sanctionner la droite depuis 2002,dont le statut social,personnel et identitaire a été alteré,qui sentent que la vie politique ce n'est pas pour eux (essayez d'entrer au PS ou à l'UMP en simple militant et vous verrez comment on vous accueille passé la phase marketing sur Internet)et que Sarkozy n'est qu'une caricature du sérail.Les jeux sont ouverts...
Rédigé par : Gil Bernstein | 18 mai 2006 à 13:55
Les tris à plat et les tris croisés sont également disponibles sur le site du CEVIPOF.
De même, une première analyse des résultats, rédigée par l'Ifop, et disponible sur le site de cet institut : http://www.ifop.com/europe/sondages/opinionf/barocevipofv1.asp
Rédigé par : Yves-Marie CANN | 18 mai 2006 à 17:11
Merci Yves-Marie. OK pour les tris à plat, que j'avais complètement sauté. Mais si quelqu'un veut faire des analyses croisées complexes (ce que j'applele des tris croisés), qui en a le droit ou l'accès ?
Je vais contacter le CEVIPOF.
Rédigé par : versac | 18 mai 2006 à 17:51
Tu vas contacter le Cevipof?Si tu veux des entrées ou des noms à contacter à Sciences Po,je suis à toi...Par exemple,il faut contacter (il répond rapidement)Gérard Grunberg([email protected]),le directeur scientifique et membre du Cevpof,qui ne manquera pas de t'apporter son concours ou de te rediriger.
Je te déconseille Dominique Reynié qui,à mon avis,à un biais sarko un peu trop visible.Lui c'est l'OIP et non le Cevipof
Rédigé par : Gil Bernstein | 18 mai 2006 à 18:36
Et si c'était vrai...
La question ne peut plus être éludée. Pour la première fois de puis Gutenberg nos bibliothèques s’enrichissent jour après jour de contributions attestant du déclin de notre pays. La génération qui piaffe bruyamment pourrait être la première dont le sort soit moins enviable que celle qui l’a précédée. Et si c’était vrai…ce serait la première inflexion connue d’une courbe qui témoignait jusqu’alors de l’amélioration constante de notre qualité de vie.
Tout à une fin, même les civilisations. Les progrès techniques, la révolution de la communication, l’épuisement des idéologies nivellent les écarts entre pays, entre continents. Sans aller jusqu’en Chine, l’Irlande encore moyenâgeuse dans les années 80 est devenue en l’espace d’une demi génération l’égale des pays phares de notre continent. Mais nous, français, vivons l’expérience unique du reflux vertigineux de notre modèle auto célébré qui nous entraîne dans les profondeurs du classement.
Ce n’est pas le refus des politiques de tout bord d’accepter ce constat qui permettra de freiner notre chute. La droite nie la réalité, fustige les « déclinologues ». La gauche attribue ce déclin à la droite, mais ses ténors discourent comme si la mondialisation, tel le nuage de Tchernobyl, nous avait épargné. Les extrêmes des deux camps accompagnent ce processus de délitement dont ils encaissent, jubilatoires, les dividendes, en l’accélérant.
On en vient à espérer qu’un séisme, un tsunami, un raz de marée emporte la médiocratie régnante, ses chefs, ses affidés, ses porte flingue et qu’une génération nouvelle, libérée des legs de promesses surannées propose enfin un futur accessible et motivant. A moins que leurs épigones ne souhaitent enseigner à nos survivants : « nos ancêtres les français, tels des dinosaures, se sont éteints dans l’indifférence générale : c’était au début du 21 ème siècle ».
Rédigé par : Candide | 19 mai 2006 à 10:14
Les Français sont, rassurez-vous, pleins de vitalité et d'initiative, et ont une vision du monde assez claire, contrairement à la médiocratie dont vous parlez. C'est ce que disent MM. Schwartzenberg ou Bourlanges : nous sommes en 1788.
Les ténors de la droite discourent comme si le seul devoir du peuple était de lui laisser les manettes, de faire confiance à sa capacité de décision et de réforme,... exception faite du sujet "immigration - étrangers - islam", sur lequel le peuple est crédité d'une grande lucidité par les mêmes ténors.
Bien sûr qu'il faut prendre la relève de cette pseudo-élite, dont la seule vision du monde est la conservation de ses privilèges dans une économie mondialisée, un territoire contrôlé, un climat climatisé.
Rédigé par : FrédéricLN | 19 mai 2006 à 14:27
Et si le CEVIPOF avait tort, et les éditorialistes avec lui ?
Bien sûr, les Français sont pessimistes sur le destin de l'Etat, et de la France, et un peu de l'Europe. Mais sont-ils pessimistes tout court ? ("angoissés", "anxieux", voire tétanisés, comme on nous les décrit à longueur de colonnes). Pour ce que j'en vois dans le train le matin, ils n'en ont pas l'air ; disons, pas plus qu'il y a 5 ou 10 ans. Plutôt plus relax, je dirais, ce qui est le contraire de l'anxiété.
Jusqu'à plus ample informé, j'en reste à mon analyse : crise de défiance du peuple envers ses pseudo-élites.
Ce qui change le plus de 1788, c'est le rapport numérique : de mémoire, la noblesse de cour faisait 1%, la noblesse de robe 1%, le clergé 2% ; leurs équivalents modernes doivent faire 3-5% (dirigeants, libéraux et cadres supérieurs d'entreprise), 3-5% (cadres du service public) et 1-2% (journalistes, auteurs, personnages des médias) - ah ben finalement, estimation faite, le changement n'est pas si grand.
Rédigé par : FrédéricLN | 20 mai 2006 à 16:29
Quelques reflexions, dont vous pardonnerez peut-etre la mediocre structuration car on m'attend pour aller faire du velo au parc:
Pour moi, nous sommes plus en 1934 qu'en 1788. A la croisee des chemins. Le mouvement "ouvrier" (la gauche alter) comme le mouvement nationaliste, poussent les portes du pouvoir, mais personne, surtout pas l'electorat, n'est pres a les leur ouvrir.
La France n'est pas disposee a franchir le pas qu'ont franchi les polonais, les autrichiens, les italiens ou les suisses (et les suissesses, car je revais un jour d'utiliser le mot le plus riche en "s" de la langue francaise), en accueillant les extremes dans leur coalition gouvernementale. Le tabou reste tres fort. Je ne vois pas la France le briser, meme avec Sarkozy. Une bonne chose, peut-etre, mais qui nous condamne a faire gouverner le pays par des gens qui ne representent que 20% du pays.
Alors on fait quoi ? On continue comme ca ? Helas, c'est peut-etre le scenario le plus probable..., qui peut nous faire perdre encore 5 ou 10 ans en grillant Sarko et/ou Royal comme nous avons carbonise une generation entiere de bons politiques (a commencer par Rocard).
Je vois deux conditions a une evolution:
- Faire vite le deuil de la generation Mitterrand (a laquelle j'inclus ses adversaires)
- Deverrouiller le clivage droite-gauche, en faisant de l'UDF un FDP a la francaise, qui pourrait gouverner avec la gauche ou avec la droite sur des plates-formes gouvernementales quinquennales.
Sarko, coince entre l'extreme droite et les lambeaux des forces chiraquiennes, ne peut pas etre le leader d'une Grosse Koalizion. Dans cette perspective, c'est donc Segolene ou DSK qui representent la veritable rupture (avec une preference pour la - tres relative - jeunesse de Segolene). Si Bayrou est serieux, une coalition PS-UDF-Verts est tout a fait plausible, avec une Royal modeste a l'Elysee pour incarner le renouveau et le rassemblement (des hommes ET des femmes, des cathos ET des laiques, des gauchos ET des cadres), un DSK energique a Matignon, l'UDF et les Verts aux commandes des commissions parlementaires.
Il faudra quand meme une petite reforme constitutionnelle pour renforcer le parlement.
Rédigé par : Philippe | 21 mai 2006 à 07:51
Je découvre avec retard, Philippe, votre intéressante réponse.
J'ai des doutes sur vos arguments. Les Français ont accepté le PCF de Marchais au gouvernement, un an à peine après que celui-ci ait justifié l'invasion soviétique de l'Afghanistan : et vous doutez que, 25 ans après, il y ait un tabou contre l'extrémisme ? Ils sont porté aux commandes de grandes villes (Orange, Toulon) des maires FN. Pourquoi n'accepteraient-ils pas des ministres FN ? je ne vois pas le tabou.
Plus un point de vue personnel : considérer l'UDF comme une force d'appoint tout juste bonne à présider des commissions parlementaires (ce qu'elle fait déjà), et se résigner à la "petite" réforme constitutionnelle qu'il "faut", c'est à mon avis sous-estimer grandement la révolution démocratique dont la France a besoin ... sauf à ce qu'elle tombe entre les mains des prétendus "chefs" et "rassembleurs" que vous pensez/espérez tabous.
Rédigé par : FrédéricLN | 30 mai 2006 à 10:29
Comment faites-vous pour assimiler le Parti Communiste Français au Front National , sans être immédiatement étouffé par la honte de votre forfait ?
La grande sauce, la grande bouillie morale et idéologique...
Ne savez-vous pas, Monsieur, qu'il existe, par exemple, une station de métro qui porte le nom de Guy Mocquet ? Ne savez-vous pas, Monsieur, que c'est l'Armée Rouge qui a libéré le camp d'Auswicht ? N'avez vous donc pas le moindre respect pour ces modestes militants qui au péril de leur vie parfois, de leur confort toujours, ont lutté pour un monde meilleur, ici et là. Ne savez-vous pas Monsieur, que l'auteur de la Question était et demeure Communiste ? Ne vous a t'on donc pas appris le respect de l'autre, de l'Autre, à Sainte Geneviève ?
Rédigé par : ponolive | 30 mai 2006 à 13:24
Il y aussi des gens éminents au Front National, et plus généralement parmi les nationalistes.
Et il y a eu évidemment nombre de repentis voire de honteux parmi les anciens communistes et compagnons de route (dont pour ces derniers, mon maître J-M Domenach).
Mais je présume que votre commentaire était humoristique !
Rédigé par : FrédéricLN | 31 mai 2006 à 22:34
post-scr. : je n'assimile évidemment pas, contrairement à ce que vous suggérez (sans doute toujours avec humour), PCF et FN. Je fais simplement suite à ce qu'écrit Philippe :
"Le mouvement "ouvrier" (la gauche alter) comme le mouvement nationaliste, poussent les portes du pouvoir, mais personne, surtout pas l'electorat, n'est pres a les leur ouvrir."
J'ai le plus grand respect pour tous les militants sincères quel que soit leur combat ; et la plus grande détermination à combattre leur idéologie s'il s'agit, par exemple, du nationalisme ou du communisme.
Rédigé par : FrédéricLN | 31 mai 2006 à 22:39
Non j'étais sincèrement en colère. Je crois qu'il y a un impensé anti-communiste (d'autant plus stupéfiant qu'il n'y a plus de communisme).
détail : vous évoquez le soutien de Marchais aux soviétiques, ne pensez-vous pas, à la lumière des évènements qui ont suivi, que ce n'était pas si scandaleux ?
Vous évoquez des militants FN de valeur : lesquels ?
Pour ma part je ne connais qu'un nationaliste que je respecte sincèrement : mon ancien professeur Pascal Gauchon. A part lui, personne.
J'ajoute enfin que la mode de la pensée Livre Noir me scandalise : j'ai connu en Israel des rescapés qui m'ont parlé de l'avance de l'armée rouge, du départ, de la fuite, des criminels SS. En leur mémoire, je ne peux faire de symétrie entre les bourreaux et les libérateurs.
Rédigé par : ponolive | 01 juin 2006 à 08:16
Non, il n'y a pas d'antisémite éminent.
Rédigé par : ponolive | 01 juin 2006 à 08:18
Soyons simple :
1) pas de symétrie. Simplement une catégorie "totalitarismes" et un combat contre eux : la démocratie.
2) (re)lisez l'Archipel du Goulag. Le PCF prosoviétique, c'était *après* la parution de Soljénytsine.
Et quand je vous lis, il me semble que le combat continue.
Rédigé par : FrédéricLN | 01 juin 2006 à 16:17
Vous ne m'avez pas répondu sur les gens du FN estimables ? Qui ? Marine ? Golnish (orth)?
Quand vous parlez du combat qui continue, voulez-vous dire que vous souhaitez débattre, ou plutôt que ça vous démange un peu de me faire taire ?
Y a t'il une légitimité quelconque à ne plus être anticommuniste (et que vous voudriez comprendre) ou bien la cause est-elle entendue et vous passez à autre chose avec certitude ?
Je ne suis pas très 'continuons le combat' - plutôt à avoir envie de dégoupiller les fausses évidences, à interroger des parcours et des réflexions.
Nous sommes d'horyzons différents, ça peut-être intéressant.
Rédigé par : ponolive | 01 juin 2006 à 16:32
Gens du FN estimables : vous en avez cité un, ce qui me semble suffire à la démonstration. Beaucoup de Français (en tout cas, moi) ont sur leur carnet d'adresses, parmi leurs amis ou parents, au moins 1 personne qu'ils estiment et qui a voté FN.
"Il me semble que le combat continue" : je faisais référence à l'agressivité et aux références "2ème guerre mondiale" de vos propres commentaires, qui me semblaient tout à fait anachroniques au regard de mes propos.
"Il n'y a plus de communisme" : il y en a moins. Voyez Pyongyang. Encore une fausse évidence.
"Soutien de Marchais aux soviétiques ... pas si scandaleux au regard des évènements qui ont suivi" : que voilà de la réécriture d'histoire. En 1980, lors de l'invasion soviétique, M. Marchais justifie l'invasion soviétique en brandissant devant la caméra de la TV française un dossier qui, selon lui, contient les photos des installations de la CIA en Afghanistan ; le dossier était (physiquement) vide, les installations inexistantes. Quels évènements ultérieurs justifient, à votre sens, ce genre de falsification ?
Rédigé par : FrédéricLN | 01 juin 2006 à 20:50
Addendum : afin de dissiper tout malentendu sur le sens de mon interpellation de Fred, je tiens à dire qu'en aucun cas je ne trouve que ses interventions sur Versac puisse avoir quoi que ce soit à voir avec une pensée d'extrême droite, encore moins antisémite.
Je considère en revanche que nous, NON-communistes d'APRES le communisme sommes pris dans un discours ANTI-communiste, et que notre effort de citoyens doit tendre à analyser ce discours, ce piège du discours toujours-déjà-là et à nous en dépétrer; c'est même là une grande leçon des dissidents, de leur courage, de leur sacrifice.
Rédigé par : ponolive | 02 juin 2006 à 08:33
Frédéric, il ne vous a pas échappé que le communisme ne constitue pas vraiment une mencace pour la démocratie actuellement, même si en Corée du Nord on compte encore les grains de riz.
En ce qui concerne l'Afghanistan, vous savez que la libération de ce pays suite au retrait de l'Armée Rouge n'a pas amené que des bonnes choses. Les talibans (soutenus autrefois par le camp de la liberté...). Vous savez aussi que si l'armée rouge n'occupe plus l'Afghanistan, ce sont des armées occidentales (dont la nôtre) qui y sont. C'est pour ça que rétrospectivement l'invasion soviétique ne déclenche pas mon indignation.
En ce qui concerne ma propre agressivité, je reconnais avoir été très en colère. Je vous demande de l'excuser, le pouvez-vous ? Mais j'ai aussi cherché le débat d'idées, vous ai écrit de nombreuses fois... Pour un flingueur, c'est beaucoup. Non, Fred, je ne suis pas l'homme au couteau entre les dents, pas plus que vous n'avez le bérêt du milicien.
Vous vous interrogez sur la pertinence de références historiques. On ne peut pas trouver que la guerre civile en Ukraine dans les années 20-30 est une référence valable et ne pas se souvenir que l'Armée Rouge a libéré de nombreux camps, et que la Résistance soviétique à l'invasion a été héroïque : nous avons, nous, une dette. Nous sommes libres, vivants, parce que des paysans du Caucase avaient assez de foi dans le petit père des peuples pour aller se faire trouer la peau à Stalingrad. C'est ainsi.
Je vous accorde que cela ne justifie pas le PCF des années 70 - mais alors analysez la société soviétique de ces années puisque vous reprochez la connivence PCF-URSS. L'URSS de 1970 n'est pas celle Staline, l'atmosphère n'a rien à voir. Je le sais d'autant mieux que pour ma part j'ai lutté contre ce régime et pour les refuzniks. Pas par des mots, mais des actes.
Enfin je vous le demande toujours : qui a part Pascal Gauchon suscite à l'extrême droite votre respect ? (Pour info, l'odieux militant rouge que vous croyez, votre serviteur comme on dit poliment, n'a cessé de demander à Nicolas Demorand d'inviter l'historien à qui tant d'entre nous doivent beaucoup et qui donnait de précieux conseils au petit étudiant sioniste que j'étais).
Je lutte contre le discours anti-communiste, contre son impensé, un impensé dangereux pour les valeurs que vous croyez défendre.
Je ne suis ni votre ennemi, ni votre adversaire. En démocratie, on appelle cela un contradicteur.
Rédigé par : ponolive | 02 juin 2006 à 08:58
(Effectivement, ce dialogue public est doublé d'un échange de mails !)
Je constate avec plaisir que cette discussion a passé le point Godwin, et en est revenue (du moins l'espéré-je).
Je crois que chacun peut épiloguer en textes de plus en plus longs au sujet des idées que lui-même ne partage pas - dans le grand nombre des raisons qu'il a pour cela, il y en a bien une sur laquelle autrui ne sera pas d'accord, etc. : ce débat d'idées-refusées évolue(rait) en dialogue de sourds.
Il est sans doute plus productif d'explorer les idées que l'on a ou en lesquelles on croit, ce que j'essaye de faire en général.
J'ai moi-même échoué sur l'écueil dans mon commentaire du 30 mai en qualifiant le PCF *de 1980-81* "d'extrémiste". J'assume l'échouage (en rejetant bien entendu la plupart des idées que semblent me prêter les commentaires de ponolive, ainsi qu'une partie de ses analyses historiques) mais souhaite, si la marée le permet, me déséchouer et aborder plutôt ce qui me semble juste ! Mes excuses à celui/ceux que cela décevrait.
Rédigé par : FrédéricLN | 02 juin 2006 à 09:47
Bien sûr j'accepte votre révérence, mais je la regrette.
L'ancien élève de Pascal Gauchon et de quelques autres professeurs à qui je dois tout se chagrinera que vous ne considériez pas que tout discours actuel est un discours historique (voir aussi Foucault, Il faut défendre la société).
L'apprenti talmudiste que je m'efforce de demeurer regrette aussi que, selon vous, le désaccord mène nécessairement au "dialogue de sourds".
La controverse dans le judaisme fait jaillir du sens, du vrai - un vrai toujours extérieur, fulgurant, étranger, fugitif.
Bon parcours intellectuel, politique et spirituel, Frédéric.
Rédigé par : ponolive | 02 juin 2006 à 10:13
A tous : le livre de Raisky qui s'appelle je crois "L'enfant juif et l'enfant ukrainien"
Rédigé par : ponolive | 02 juin 2006 à 10:21
Merci ; pour le très très peu que je connais du talmud (quelques allusions du dimanche matin télévisuel), la controverse s'y fait souvent en confrontant deux vérités, ce qui fait ressortir leur caractère partiel et l'importance de l'humanité comme chemin d'une vérité qui vaille mieux que la logique formelle.
C'est pourquoi je trouvais peu productif notre controverse sur l'interprétation à donner de deux erreurs.
Rédigé par : FrédéricLN | 02 juin 2006 à 10:23
Le PCF dans ca connerie de soutien aveugle a l'URSS a soutenu l'invasoin américaine et donc, si j'en lis quelques commenaires était (à mon avis il a changé ) extrémiste soius Marchais...
Soit...Je ne vais meme pas vous contredire....
Mais les soutiens à l'UMP par exemple de l'invasion de l'IRAK, peut on , doit on les taxer d'extrémistes ?
Chaque parti adans son passé des zones plus ou moins sombres...Et puis qui a voté les pleins pouvoirs à Pétain ? Est ce pour autant que l'on doit taxer le PS d'extrémiste ? bien sur que non...
En tout cas je vous suggère de lire (il est en ligne) le programe actuel du PCF...
Il n'y a rien d'extrémiste dedans...Pas d'expropriation prévue...
D'ailleurs il est drole de constater que la plupart des français croient que le communisme est contre la propriété privée alors qu'il vise à nationaliser ou plutot mutaliser, socialiser les biens de production jugés comuns...
Bref bref...
Rédigé par : Cellule Blanqui, Paris | 29 août 2006 à 11:43
J'ai une soudaine envie d'essayer certains de relativiser l'extrémisme des uns et des autres...
Qui aujourd'hui est fnatique de la Chine ?
Le PCF ou le MEDEF ?
Il est drole de voir à quel point ce pays pourtant non démocratique, pratiquant l'opression est admiré par nos chers libéraux...et je suis désolé mais combattu pour pratiquer une concurrence déloyable par le PCF ...
Perso, je me marre....
Rédigé par : Cellule Blanqui, Paris | 29 août 2006 à 11:45